Toute une vie avec l’arthrite : l’histoire de Lauren
En décembre dernier, Arthrite-recherche Canada a organisé le défi Entraînez-vous pendant les fêtes avec sa porte-parole, Spencer O’Brien. Nous avons encouragé les participants à suivre la snowboardeuse canadienne sur les médias sociaux pour les inciter à faire de l’exercice de la manière qui leur convenait le mieux. Le prix à gagner? Une veste Beta offerte par Arc’teryx.
Nous sommes heureux d’annoncer que la gagnante est quelqu’un qui vit et qui respire l’activité physique depuis qu’elle a commencé à souffrir de polyarthrite rhumatoïde à l’âge de deux ans.
Voici ce que notre gagnante, Lauren Zigelstein, avait à dire sur la vie avec l’arthrite, l’importance de l’activité physique, et les raisons pour lesquelles elle a participé à notre défi!
De quel type d’arthrite souffrez-vous et à quel âge avez-vous reçu votre diagnostic?
Mes parents ont appris que je souffrais de polyarthrite rhumatoïde juvénile (aujourd’hui appelée arthrite juvénile idiopathique) lorsque j’avais deux ans.

Pouvez-vous nous raconter comment vous avez été diagnostiquée?
J’étais une petite fille très active, mais j’ai peu à peu pris du retard dans mon développement. J’ai commencé à ramper davantage et je faisais mon possible pour ne pas rester debout longtemps. Ma mère a remarqué un jour qu’un de mes orteils semblait gonflé et enflammé, et elle m’a m’emmenée chez le pédiatre. J’ai ensuite dû aller à l’hôpital pour enfants malades (SickKids) de Toronto, où des médecins ont effectué des analyses de sang et ont évalué mes symptômes. Ils ont alors diagnostiqué une polyarthrite rhumatoïde.
Quel a été l’impact de la polyarthrite rhumatoïde sur votre vie?
Vivre avec la polyarthrite rhumatoïde a certainement façonné ma vie autrement. Il est difficile de vivre avec une maladie chronique, et il y a des moments très éprouvants, mais la maladie m’a permis de faire preuve de plus de résilience et de perspicacité. Aussi loin que je me souvienne, la maladie a fait partie de qui je suis. J’ai appris à être constamment à l’écoute de mon corps, à faire très attention aux signaux qu’il m’envoie, et à tout faire pour privilégier l’énergie et le mouvement. La maladie m’a également appris à ne jamais considérer mes capacités physiques comme étant acquises, car je sais à quel point elles peuvent changer rapidement. Même si la polyarthrite rhumatoïde présente son lot de défis, elle m’a poussée à cultiver un état d’esprit tourné vers la gratitude et l’adaptabilité qui a enrichi d’autres aspects de ma vie.
Quels ont été vos plus grands défis?
On croit souvent, à tort, que vivre avec la polyarthrite rhumatoïde signifie douleurs et souffrances constantes, mais en réalité, les symptômes ont tendance à fluctuer. Ils peuvent s’aggraver en raison d’un choc physique ou même d’un virus, mais ils semblent aussi parfois surgir de nulle part. Un de mes plus grands défis a été de surmonter l’angoisse, cette peur que les autres pensent que j’exagère ou que je me sers de ma maladie comme d’une excuse. Je me sens souvent obligée de me surpasser pour prouver que l’arthrite ne me ralentit pas. J’ai aussi éprouvé des difficultés à parler de ma santé aux autres. J’ai peur que les gens considèrent que je suis toujours en train de me plaindre. Je réserve donc mes « plaintes » pour les moments difficiles, lors d’une poussée par exemple. La réalité, c’est que le fardeau émotionnel d’une poussée est très réel, et qu’il mérite autant d’attention que les symptômes physiques.
Enfin, les « et si » peuvent être accablants. Et si mes enfants souffraient eux aussi de polyarthrite rhumatoïde? Et si mes médicaments avaient des effets secondaires encore plus graves? J’essaie de gérer ces moments d’angoisse en me concentrant sur ce que je peux contrôler, en restant active, en ayant une alimentation équilibrée et en maintenant de bonnes habitudes de sommeil. Cela me permet de garder un certain équilibre face à l’incertitude.
Quel est le rôle de la nutrition et de l’activité physique dans votre vie de tous les jours?
J’ai reçu mon diagnostic de polyarthrite rhumatoïde à un très jeune âge, et cela a été, à bien des égards, une bénédiction déguisée. J’ai appris à gérer ma maladie dès le début, et les habitudes que j’ai prises très tôt m’ont accompagnée toute ma vie. Adolescente, j’ai participé à de nombreuses compétitions de natation et j’ai joué dans plusieurs équipes. J’ai donc appris très tôt à quel point l’activité physique et la nutrition sont cruciales pour les performances et le bien-être général. Ces leçons font partie de qui je suis.
À l’âge adulte, j’ai connu des hauts et des bas en termes d’activité physique et d’alimentation. Je me suis rendue compte que mes articulations me faisaient souffrir davantage lorsque j’étais moins active et que je ne faisais pas autant attention à ce que je mangeais. J’ai également constaté que le stress affectait grandement mon niveau d’activité physique et mes habitudes alimentaires. En période de stress, je trouve souvent des excuses pour éviter de faire de l’exercice ou pour faire de mauvais choix alimentaires. Ce n’est que lorsque j’ai commencé à gérer activement mon stress que j’ai pu redonner la priorité au mouvement et à la nutrition. Aujourd’hui, je comprends l’importance de ces deux piliers dans la prise en charge de ma maladie, et je me fais un devoir de maintenir cet équilibre dans ma vie.
Quel est votre programme d’exercice habituel?
Mon programme d’exercice change en fonction de la saison et de mes objectifs spécifiques. En ce moment, je m’entraîne pour un relais de 160 km, où je vais courir avec sept de mes collègues et coéquipiers sur une distance de 20 km. Mon entraînement consiste à courir quatre fois par semaine (deux courses courtes et faciles, une course tempo et une course longue à un rythme tranquille). Pour que mes articulations et mes os tiennent le coup pendant la course, j’incorpore également trois séances de musculation par semaine, en me concentrant sur les mouvements qui sont importants pour les coureurs.
Pendant l’intersaison, ma routine est moins stricte. Je cours deux à trois fois par semaine à un rythme tranquille et j’incorpore trois à quatre séances de musculation.
J’ai couru mon premier demi-marathon l’automne dernier, et j’ai adoré expérience. Après la course, j’ai cependant eu une poussée de polyarthrite rhumatoïde qui m’a obligée à arrêter pendant quelque temps. Je n’aurais pas su comment gérer correctement cette poussée ni comment reprendre la course à pied en toute sécurité sans le soutien et les conseils de quelques physiothérapeutes extraordinaires et de mon rhumatologue. D’autres personnes atteintes de la même maladie que moi peuvent aussi faire de la course à pied. Il faut cependant l’envisager avec les soins et les conseils appropriés de professionnels compétents qui comprennent les défis uniques de la vie avec l’arthrite.
Avez-vous des conseils à donner aux personnes atteintes d’arthrite inflammatoire qui ne savent pas par où commencer pour faire de l’exercice?
Il faut surtout et avant tout investir dans sa propre santé. Nous avons la chance de vivre dans un pays où les soins de santé sont gratuits, mais de nombreux régimes d’assurance privés imposent des plafonds assez bas pour les prestations complémentaires, et cela nous fait hésiter avant d’engager des dépenses pour certains services qui sont pourtant nécessaires. Nous finissons souvent par attendre que nos prestations soient renouvelées ou par chercher des solutions qui ne sont pas nécessairement adaptées à nos besoins. J’encourage plutôt les gens à donner la priorité à leur bien-être en s’appuyant sur des ressources qui correspondent aux soins spécifiques dont ils ont besoin. Trouvez des professionnels qui comprennent l’arthrite et qui peuvent vous aider grâce à des exercices efficaces et sans danger. Travailler avec des experts qui connaissent les défis uniques que pose l’arthrite inflammatoire, et qui ont une longue expérience du mouvement et de l’exercice, peut faire une très grande différence dans votre façon de bouger, dans ce que vous ressentez et dans votre prise en charge de la maladie.
Que se passe-t-il si vous ne faites pas d’exercice régulièrement?
Lorsque je ne fais pas d’exercice régulièrement, je ne me sens pas moi-même. Je suis moins optimiste, je me sens moins forte, mon corps me fait souffrir, et je me sens perdue. Pouvoir bouger est un don du ciel. Chaque fois que je vais courir, je pense à la chance que j’ai de pouvoir bouger et de faire de l’exercice. Je ne considère jamais cela comme acquis.
Les femmes dans la quarantaine savent que leur masse musculaire diminue naturellement avec le temps. Nos muscles protègent nos articulations. C’est pourquoi je m’entraîne maintenant, non seulement pour aujourd’hui, mais aussi pour l’avenir. Je veux jouer avec mes petits-enfants, me relever sans aide et profiter de ma retraite avec le moins de restrictions possibles. L’exercice que je fais aujourd’hui est donc un investissement pour plus tard.
Pourquoi avez-vous voulu participer au défi Entraînez-vous pendant les fêtes d’Arthrite-recherche Canada? Et comment avez-vous vécu l’expérience?
J’ai voulu participer au défi Entraînez-vous pendant les fêtes d’Arthrite-recherche Canada parce que je crois sincèrement que le mouvement et des habitudes de santé positives sont essentielles pour créer un changement durable. La sensibilisation permet de venir en aide à un plus grand nombre de personnes atteintes de maladies inflammatoires, et elle contribue à mettre en place des réseaux de soutien qui leur donnent l’occasion de prendre leur santé en main. Arthrite-recherche Canada offre des ressources accessibles qui peuvent faire une réelle différence dans la gestion de l’arthrite, et participer à ce défi était pour moi une façon de contribuer à cette cause.
Pourquoi pensez-vous que la recherche sur l’arthrite est importante?
La recherche sur l’arthrite est extrêmement importante, surtout pour quelqu’un comme moi qui en a bénéficié directement et qui a vu les progrès réalisés. Lorsque j’ai été diagnostiquée pour la première fois, les médicaments biologiques n’existaient pas, et je n’ose pas imaginer à quel point il aurait été difficile de gérer mes poussées fréquentes sans les percées réalisées dans le domaine de la recherche médicale. Ces progrès ont permis de sauver des vies, et les recherches en cours offrent l’espoir de traitements et de résultats encore meilleurs. La recherche est essentielle pour améliorer notre qualité de vie et pour faire en sorte que les générations futures ne soient pas confrontées aux mêmes défis.
Que voudriez-vous que les gens sachent sur l’arthrite et sur ce que c’est que de vivre avec cette maladie?
Grandir avec la polyarthrite rhumatoïde m’a isolée. Lorsque j’étais enfant, je ne connaissais personne qui vivait ce que je vivais, et je n’avais personne à qui parler de mes expériences. Honnêtement, même à l’âge adulte, je ne connais toujours pas beaucoup de gens de mon âge qui vivent avec cette maladie. Ce que j’aimerais que les autres sachent, c’est que si la polyarthrite rhumatoïde fait partie de ma vie, elle ne me définit pas. Ma façon de vivre, avec l’exercice, la musculation et la course à pied, m’aide à gérer ma maladie et à faire face aux défis qui en découlent. Le mouvement est une bénédiction et, même si je dois parfois me ménager, je continuerai toujours à bouger le plus possible. Il est important de trouver un certain équilibre et de prendre soin de soi, quoi qu’il arrive.